Le recrutement des donneurs de spermatozoïdes et donneuses d’ovocytes

Fév 14, 2016 | Actualités CECOS

Recrutement des donneurs et donneuses

En octobre 2014, la Grande Bretagne annonçait l’ouverture de la première « banque de sperme » nationale au Birmingam Hospital (cf Newsletter 1). L’objectif était de lutter contre la pénurie de donneurs de spermatozoïdes observée depuis plusieurs années et dont une des causes serait la levée de l’anonymat du don par les autorités britanniques en 2005. La couverture médiatique et les campagnes d’informations nationales sur le don étaient assurées par le National Gametes donation Trust (NGDT), subventionnée par le National Health Service, et le ministère de la Santé.

 En septembre dernier, la directrice de la banque Laura Witjens a présenté son premier bilan, avec seulement 9 donneurs de spermatozoïdes acceptés depuis l’ouverture du Centre. Devant ces résultats très faibles, Laura Witjens cherche des solutions pour augmenter le recrutement des donneurs, et elle a décidé de lancer courant septembre une campagne de communication pour faire venir les donneurs  britanniques. Pour stimuler la générosité des hommes, la banque a pris exemple sur la méthode danoise, qui consiste simplement à flatter l’ego masculin. Il s’agit d’inciter les donneurs à prouver leur virilité en donnant leurs spermatozoïdes. Le donneur serait ainsi une sorte de « superman », et elle justifie cette idée par le fait que les « donneurs doivent avoir un sperme exceptionnellement résistant pour supporter les tests de congélation décongélation« . Le risque de cette idée est cependant de mettre en relation la virilité et la fertilité, et en conséquence de dévaloriser l’image de l’homme infertile, candidat au don de spermatozoïdes. Gérer cette contradiction évidente entre le besoin de donneurs et le respect de l’homme infertile expose cette campagne à des critiques qui n’ont pas manqué d’apparaitre dans la presse anglaise.

Cette campagne serait encore renforcée en fin d’année en proposant aux hommes de faire un cadeau de Noël en donnant leurs spermatozoïdes. Cette idée de la « banque de sperme » britannique n’est pas sans nous rappeler la campagne menée en France par l’Agence de Biomédecine.

En effet la France est confrontée aux mêmes difficultés de recrutement de donneurs de gamètes et en particulier de donneuses d’ovocytes et l’Agence de Biomédecine a lancé une campagne sur le don de gamètes. L’idée du projet était de s’adresser directement au donneur de gamètes, qui devenait un « donneur de bonheur ». Le lancement réalisé en novembre 2014 comprenait une publicité internet et un point presse, avec une affiche qui voulait valoriser l’objet du don : le spermatozoïde ou l’ovocyte en tant que cadeau.

Quelques mois après, plus de 100 retombées de presse avaient été observées par l’Agence, et la publicité par le site internet semblait avoir eu un impact puisque qu’elle avait permis de récolter 2830 adresses mail de personnes intéressées qui souhaitaient recevoir une information.

Cependant, sur le terrain, les choses ont été très différentes, puisque  l’analyse des résultats obtenus dans les centres ne montre pendant cette période aucune augmentation du nombre de candidats donneurs ou donneuses.

 L’idée du « cadeau » n’a donc pas vraiment suscité la générosité du donneur et on peut regretter que l’objet du don: la solidarité des donneurs face à la détresse du couple infertile ne soit pas au centre de la campagne. La notion de cadeau réifie le gamète et fait ainsi appel à des valeurs matérialistes qui paraissent peu appropriées au sujet de l’enfant à venir, alors que la notion de solidarité fait appel à des valeurs plus humanistes, de partage d’un bonheur.

En juin dernier un deuxième point fort de cette campagne a eu lieu, avec cette fois comme nouveauté le passage d’un spot radio sur les stations nationales pendant 3 semaines. L’idée contenue dans ce message de 30 secondes était clair: « j’ai la chance d’avoir des enfants, je peux aider un couple infertile en donnant mes gamètes ». La solidarité était cette fois au centre du message et cette médiatisation par la radio a eu un impact certain, avec une augmentation de près de 30% du nombre de donneurs ou donneuses pendant cette période.

(1000 donneuses d’ovocytes et 487 donneurs de spermatozoïdes se sont présentés dans les CECOS du 1er janvier 2014 au 31 aout 2015. Plus de 50% des donneurs ou des donneuses sont relationnelles mais on peut cependant noter  que 32% des donneuses d’ovocytes et 25% des donneurs de spermatozoïdes sont venus spontanément.)

Enfin, un troisième point fort de cette campagne a eu lieu en octobre après la parution par le Ministère de la Santé du décret d’application de la loi de bioéthique de 2011 qui prévoyait d’étendre le don de gamètes  aux femmes et aux hommes n’ayant pas procréé. Pour inciter ces dons, la loi prévoit qu’ils ou elles pourront conserver une partie de leur gamètes pour leur propre bénéfice ultérieur. L’Agence de Biomédecine a profité de la parution de ce décret pour relancer la campagne sur le don, mais en l’élargissant cette fois à toute  personne avec ou sans enfant. Une avancée certaine pour certains, un retour en arrière pour d’autres, car il faut rappeler que dans les années 70 il existait déjà en France dans certains centres des donneurs célibataires sans enfants. Ce qui est certain, c’est que ce décret nous éloigne beaucoup du  principe fondamental du don de gamètes dans les CECOS, appliqué depuis plus de 40 ans, basé sur la solidarité:    » le don d’un couple qui a des enfants à un couple qui en désire », et qui avait été retenu dans la première loi de bioéthique de 1994. Il faudra évaluer les conséquences de ce décret sur le recrutement des donneurs: Y-aura-t-il une augmentation significative des donneurs et donneuses sans enfant, et quelle seront leurs motivations, altruistes ou intéressées par les possibilités d’autoconservation de leurs gamètes? ? Et d’un autre coté, quelle sera l’attitude des couples avec enfants : seront-ils toujours aussi nombreux ou se sentiront-ils moins concernés par ce nouveau système avec le possible risque de se détourner du don? Ce nouveau décret soulève beaucoup de questions, et il sera important d’ici un an d’analyser les résultats des centres afin de d’évaluer son impact sur les donneurs et donneuses.

  Dominique LE LANNOU

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